Frank Catalano
Discographie et Chroniques discographiques

 

Discographie complète

CD 1998. Cut it out, 1998, Delmark 501
CD 1999. Pins “N” Needles, Chicago Lake Side Jazz. 607
CD 2001. Live at the Green Mill, Delmark 536
CD 2004. Street jazz, A 440, Music Group 555
CD 2008. Bang, Savoy Jazz 17734
CD 2009. Mighty Burner, Bright Records 501
CD 2012. Old Skool, Blue Sky Fable 009
CD 2012-2013. Love supreme collective, Ropeadope 237
(Volet 1 du triptyque)
CD 2014. God’s gonna cut you down, Blujazz 3434(Volet 2 du triptyque)
CD 2015. Havana Nu Beat Suite, Ropeadope 288
CD 2015. Bye Bye Blackbird, Ropeadope.
(Volet 3 du triptyque)
CD 2017. Tokyo N°9, - Live-, Ropeadobe.


 


Love Supreme Collective
Frank Catalano/ Jimmy Chamberlin

Acknowledge of truth, Resolution of Purpose, Pursuance and Persistence, Psalm for John.
Frank Catalano (ts, ss), Jimmy Chamberlin (dr), Percy Jones (bass), Adam Benjamin ( keyb), Chris Poland (g).

Enregistré  à Chicago en 2012 et 2013
Durée 22’
Ropeadope 13833

 
God’s gonna cut you down

Frank Catalano/ Jimmy Chamberlin

Shakin, Karma, Expressions (for John Coltrane), Tuna Town, God’s Gonna cut you down, Big al’s theme and soul dream.
Frank Catalano (ts), Jimmy Chamberlin (dr), Demos Petropoulos (Hammond B3), Scott Hesse (g), Eddie Roberts (g), Mike Dillon (vib.)

Enregistré au I.V. Lab de Chicago en janvier et février 2015.
Durée  41’05
Bluejazz 3434


Handicapé par un accident Frank Catalano reste toute l’année 2011 sans pouvoir s’exprimer musicalement. Il passe et repasse sans cesse la musique de John Coltrane qu’il a toujours aimée. Coltrane et l’album Love Supreme lui permettent de maintenir son cerveau en ébullition. Il ne pense alors qu’à rendre hommage à John et conçoit Love Supreme Collective. Catalano appelle pour cela son ami de longue date Jimmy Chamberlin qu’il considère comme le batteur adéquat pour son projet. Jimmy lui fait penser à Elvin Jones. Il invite également le bassiste Percy Jones, une vieille connaissance. Tous les trois s’enferment dans un studio pour enregistrer quasiment en live. Les parties de guitare sur « Psalm for John » et de keyboard sur le premier thème et sur « Pursuance and Persistance » seront ajoutées par la suite après un long et méticuleux travail.
Le disque ne constitue pas une reprise des quatre thèmes  même si le saxophoniste  attribue à ses quatre compositions les mêmes titres que celles de Coltrane. Ce que l’on retrouve c’est la manière d’envisager le jazz,  l’esprit, l’élan vital tout en notant que Catalano laisse percer sa propre personnalité, chacun des thèmes exprimant un sentiment différent. « Acknowlegment of the truth » reste dans le même mode que celui de Coltrane. On retrouve la puissance de Coltrane, sa rapidité, mais avec un son qui frappe de plein fouet.
Il ne faut pas vouloir aller chercher davantage de rapports avec le disque de Trane. Frank réalise bien un travail personnel exprimant sa propre intériorité du moment et c’est ce qui en fait son intérêt.


Les choix sont d’ailleurs différents pour les trois autres compositions et l’écriture musicale est réalisée en fonction de ces sentiments.
Dans « Resolution of purpose », assez court, avec un son du ténor plus rond, moins agressif que pour le premier thème l’ambiance générale est plus nostalgique.

« Pursuance and Persistence »  comme chez Coltrane débute par la batterie mais ici le saxo entre de manière très précoce et reprend la violence et l’agressivité du premier thème. Là encore Frank Catalano impose une rapidité extrême. Il ouvre la porte au Free Jazz. Très vite le saxophoniste entraîne ses partenaires et les pousse à une grande vélocité. Chamberlin se déchaîne pour se mettre dans le tempo. Il démontre ses aptitudes au jazz, lui qui promène l’étiquette Smashing Pumkins.
Le « Psalm » de John devient chez Catalano « Psalm for John ». Les effets offerts par Chris Poland et sa guitare donnent parfaitement le ton psalmique du morceau. Cette fois Frank joue plus cool, laisse trainer les notes. Ce qu’il a pu percevoir dans  la musique religieuse lors de sa toute première jeunesse remonte en surface dans ce thème d’une grande beauté pour lequel le batteur se coule dans un moule différent.
Co-leader de l’enregistrement Jimmy Chamberlin a un rôle fondamental à chaque fois. Il apporte une sonorité personnelle sur laquelle s’appuie parfaitement Percy Jones. Ils offrent à eux deux une base ferme pour le saxophone de Frank Catalano. Le travail de Chamberlin, bien que Catalano valorise sa proximité avec Jones, nous semble toutefois s’en éloigner malgré une énergie assez proche dans le premier thème. Jones est plus souple, moins brutal que Chamberlin dont la tonalité est sèche et le jeu explosif. Un choix de matériel sans doute aussi. Notons aussi que Chamberlin, jazzman au départ puis rocker et de nouveau jazzman, parvient dans ce périple musical à garder son identité.

Jazz Hot N° 674

 

God’s Gonna Cut you down rompt radicalement avec le Love Supreme Collective. L’objectif pour Catalano et Chamberlin étant de déposer sur disque la musique qu’ils jouent de manière plus régulière en clubs et en concerts.  Catalano choisit le vieux thème de blues « God’s Gonna Cut you down »que la version de Johnny Cash a toujours captivé. Frank et Jimmy s’accordent pour doubler le tempo original.  Ce dernier apporte un groove funky et le Hammond B3 et la guitare maintiennent le fond blues du thème. C’est une des rares (peut-être la seule) reprise du thème par un jazzman.

Tous les autres thèmes sont des compositions de Frank Catalano.  « Big Al’s Theme and soul », « Shakin » sont en 4/4 et appartiennent à un répertoire antérieur à la venue de Chamberlin. « Shakin » est marqué par la vélocité du saxophone. La batterie y apporte son groove particulier et s’illustre abondamment dans les soli. Le son de Petropoulos face au Hammond B3 souligne parfaitement le travail du batteurl.
« Karma » possède des caractéristiques proches. Sur « Tuna Town » Jimmy et Frank mettent aussi en valeur Petropoulos. Dans « Expressions », dédié à Coltrane, Catalano retrouve un peu le jeu déployé dans le premier disque avec la même vélocité, à peine moins d’agressivité. Chamberlin soutient le solo du Hammond. Ça groove encore comme dans « Tuna Town » ! Le solo de batterie permet de bien percevoir la sonorité spéciale, très sèche que  montre Chamberlin dans le premier disque.
« Big Al’s Theme and soul » intègre à peu près tout ce qu’offrent les autres compositions, un gros son du ténor, de la puissance, de la rapidité, du groove, un feeling un peu rock. Ce thème conclue le disque d’un musicien à découvrir car jusqu’ici sa présence en France  a été trop rare.

Jazz Hot N° 674

 


Frank Catalano
Bye, Bye Blackbird.
F. Catalano (ts), J. Chamberlin (dr), D. Sanborn (as), N. Felder, (g), D. Petropoulos (B3)
Chicago Eddie, Bye, Bye Blackbird, Sugar, All Blues, At Last, Shakin.
Durée 31mn
Enregistré à Chicago en 2015.
Ropeadope  s/n et disponible en vinyle (disponible sur amazon.com)

La trilogie du saxophoniste de Chicago Frank Catalano s’achève sur ce Bye Bye, Blackbird qui fait donc suite à God’s gonna cut you down et à Love Supreme Collective (J.H 674). A l’hommage à Coltrane succède celui à Miles Davis ; inévitable reconnaissance au trompettiste qui a su donner sa chance à Frank à ses débuts. Hommage aussi à Eddie Harris, à travers « Chicago Eddie », saxophoniste de Chicago dont la sonorité a marqué Catalano, ainsi qu’à son mentor Von Freeman avec « Sugar » thème que celui-ci a joué dans son album At Long last George.
Pas plus que Love Supreme Collective n’était une reprise de l’œuvre de Coltrane, l’intention de Catalano n’est de faire une cover des deux thèmes rendus célèbres par Miles : « Bye Bye Blackbird » et « All Blues ». Catalano s’est entouré de partenaires dont le style s’éloigne de celui du trompettiste, reflète leur personnalité et se fond avec celle du saxophoniste.
L’absence de piano rompt évidemment avec les quartet et quintet de Miles et l’introduction du B3 change la donne, l’orgue offrant un caractère particulier à l’ensemble du disque. Pas de bassiste non plus mais la guitare de Nir Felder est beaucoup trop discrète à notre goût. « Bye Bye Blackbird » prend un air de jouvence. Si l’introduction est moins sèche que dans la version de Miles, le thème est plus dynamique. Présent sur ce thème David Sanborn et son alto dialoguent avec le ténor. L’excellent et énergique solo de batterie de Jimmy Chamberlin -à travers lequel on perçoit l’influence rock de celui-ci-  rompt avec le travail plus délicat de Philly Jo Jones. C’est aussi ce thème qu’avait choisi K. Jarett pour son hommage personnel au trompettiste.
C’est de nouveau le B3 qui lance un « All Blues » bien plus court que l’original. Le saxophone ténor prend le rôle de la trompette de Miles mais Frank ne peut pas s’appuyer sur le back ground de Coltrane et « Cannonball » comme le faisait Davis. Seul face au thème, Catalano montre ses aptitudes, son talent, et sa sonorité est mise en valeur. De nouveau Chamberlin s’illustre dans un style évidemment à cent lieues de ce que proposait Jimmy Cobb qui n’offrait pas de solo, Miles devant juger cela inutile pour ce thème. Frank voit les choses autrement et celui proposé par Chamberlin s’insère bien dans la version présente. Le saxophoniste aurait pu aussi sur ce thème inviter Sanborn mais on a du pur Catalano.
Pour quelle raison Frank Catalano a-t-il choisi « At last » ? Mystère. Le thème existe sur un disque sur lequel figurent Miles et Chet Baker mais c’est en réalité Chet qui joue. Originellement le thème est joué très cool mais débute ici avec un Catalano à cent pour cent, donc débordant de puissance avant de donner de la souplesse à son jeu et de revenir vers une ambiance (un peu) plus cool. Exit Sanborn. Frank joue de bout en bout et peut s’appuyer sur un excellent groove de Chamberlin et un travail discret du B3.
« Chicago Eddie » est un peu répétitif mais la prestation au saxophone est de qualité et Jimmy autant que Petropoulos au B3 et Nir Felder à la guitare sont valorisés.
Revenons sur « Sugar » ou de nouveau Catalano échange avec Sanborn, par moment dans un véritable dialogue. Le tempo permet d’apprécier le détail du jeu de Catalano qui montre toute la richesse de son style. Le B3 est encore à son avantage.
Von Freeman peut être satisfait de son influence !
« Shakin » est une reprise du thème initial du disque God’s gonna cut you down. Chamberlin et Petropoulos étaient déjà présents sur la première mouture. Pas vraiment de grosses différences avec celle-ci. Le thème dure le même temps, l’introduction au B3 est identique, précédant l’entrée du saxophone, de la batterie et des autres partenaires. Catalano laisse la place à Petropoulos qu’on trouvait plus percutant dans la version initiale et à un solo démoniaque de Chamberlin. Nir Felder dans son intervention surpasse en qualité le guitariste de la première version. Il a aussi la possibilité de s’exprimer plus longuement. Le thème s’achève avec un excellent retour du saxophoniste.

Jazz Hot N° 677

Frank Catalano
Tokyo Number 9

Ropeadobe

Les amateurs de jazz qui n’ont pas hésité en avril à découvrir au Rocher de Palmer le saxophoniste Frank Catalano avec ses French Guys ont, avec ce nouveau disque, l’occasion de retrouver le chicagoan, cette fois avec ses partenaires américains sur plusieurs des thèmes joués à Bordeaux. Il s’agit d’un enregistrement live, réalisé au Cotton Club de Tokyo, au Green Mill de Chicago et à l’Iridium de New York. Sept des thèmes ont déjà été édités au long de la trilogie réalisée entre 2014 et 2016 dans « A Love Supreme Collective », « God’s gonna cut you down », « Bye Bye Blackbird »
Deux des thèmes en 4/4, « Shakin » et « Big Al’s Theme and Soul Dream », appartiennent à un répertoire antérieur à l’entrée du batteur Jimmy Chamberlin dans la formation. Celui-ci a donc apporté sa propre personnalité, son groove caractéristique, visible notamment dans les longs soli tel celui sur « Shakin ». Frank Catalano est, sur ces deux thèmes, d’une grande vélocité avec un son puissant de son ténor. L’absence de l’orgue Hammond incite les partenaires à offrir une vision neuve de « Shakin », que l’on a pu écouter antérieurement dans les deux albums cités plus haut, et redonne plus de protagonisme au saxophoniste. Le pianiste, Teo Hill, prend aussi un rôle plus prépondérant et le surprenant Vic Juris -amateur par ailleurs de Django- fait jeu égal à la guitare avec Scott Hesse ou Chris Poland présents sur les autres versions enregistrées de « Shakin ». Il se distingue aussi dans plusieurs soli au long du disque. Dans « Big Al’s theme » où l’on retrouve les mêmes caractéristiques de puissance et rapidité le feeling tend vers le rock.
« Sugar » et « Chicago Eddie » sont deux compositions en hommage respectivement à Von Freeman et à Eddie Harris. Les versions live rompent avec l’enregistrement en studio, non seulement parce que le Hammond est absent mais aussi par l’absence d’un second saxophone sur « Sugar ». Faute de dialoguer avec celui-ci, Catalano offre une performance encore plus brillante se prolongeant plus de onze minutes dans un groove excellent. « Chicago Eddie », s’il est un peu répétitif, permet aussi au guitariste de se mettre en valeur.
Le très long « Tokyo Tuna Tune » reprend et développe le « Tuna Tunes » de la version enregistrée sur « God’s Gonna… ». Le groove est superbe. Chamberlin avec sa sonorité sèche est à son plus haut niveau et la fusion est totale entre le batteur et le saxophoniste. Teo Hill égrène magnifiquement les notes dans un solo bien soutenu par Chamberlin. Stacy Mc Michael, une des meilleures bassistes de Chicago, qui soutient parfaitement le groupe tout au long des thèmes, a ici son moment de gloire.
« Softly » de Hammerstein n’appartient pas à la trilogie. Catalano l’avait déjà joué et enregistré en live il y a plus de quinze ans. C’est donc quasiment une re-découverte à travers cet enregistrement. Le thème permet d’apprécier la continuité du jeu de Frank au long des années. Déjà le jeu est énergique, rapide sans rupture stylistique avec le reste du disque. Chamberlin, outre un beau solo, contribue largement au swing. Juris qui s’appuie sur ce swing offre aussi un bon solo et le travail du pianiste est excellent.
« Love supreme, Part 1 » est une excellente improvisation de Frank réalisée à partir du thème « Aknowledgeme of Truth » qui figure dans le premier volume de la trilogie. Cette prestation s’éloigne fortement du thème original et n’est pas évidente à identifier au point qu’elle pourrait tant elle est différente y compris dans son atmosphère doucereuse, être une nouvelle composition.

Un disque qui pourrait réchauffer les souvenirs de Frank Catalano pour ceux qui n’ont pas hésité à aller l’écouter et pourrait réconforter ceux qui ont manqué les concerts bordelais et saint-georgeais.

La Gazette Bleue N°23

 

 

 

 

 

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