VALDÉS, "Bebo", Ramón (Quivicán 1918- Stokholm 2013)

Après l'école "Bebo" VALDÉS arpente le Parque de Quivicán qu'occupent souvent les petits groupes de musique populaire de la petite ville pour la plupart des típicas. La radio et le piano de Moraima, la soeur de son ami Yolando, font réver "Bebo". Et c'est là, avec l'aide de Moraima qu'il commence à se familiariser avec l'instrument. Il a treize ans lorque sa mère gagne à la loterie, lui offre un piano et Moraima lui apprend tout ce qu'elle sait.
Il lui faut travailler plus sérieusement et en 1936 il part chez sa tante à La Havane pour pouvoir étudier au Conservatoire.
Chez celle-ci il se familiarise aussi avec les rites et rythmes lucumí et avec le jazz grâce à la radio qui capte les stations de Floride. Il poursuit ses études jusqu'en 1943 mais parallèlement joue du piano dans divers ensembles. En 1937 il est le pianiste du "HAPPY HAPPY " du trompettiste José María ULACIA sous contrat au Centro Asturiano. L'une de ses premières formations personnelles "Bebo" l'organise avec ses cousins Guillermo BARRETO -batterie- Roberto -clarinette- et "Coco" au tout début des années quarante.
"Bebo" entre en 1943 dans l'orchestre de Wilfredo CURBELO installé au cabaret Faraón. Parallèlement il devient arrangeur pour la station de radio Mil Diez. La formation de CURBELO est réputée et "Bebo" y reste jusqu'en 1945, date à laquelle il remplace René HERNÁNDEZ -parti rejoindre BAUZÁ et MACHITO- au sein de l'orchestre de Julio CUEVA. "Bebo" commence à composer et offre à Julio "Rareza del siglo". Il enregistre avec l'orchestre.
Cette même année "Bebo" VALDÉS enregistre "Comparsa barracón" et "Por el Batey" sous le nom de "ORQUESTA RÍTMICA de Bebo VALDÉS", en fait les musiciens de CUEVA.
Engagé comme arrangeur et pianiste pour le Club Zanzibar et le "Issa El Saieh Jazz Orchestra", il quitte l'île en 1946 pour la voisine Haïti. Il y approfondit ses connaissances des rythmes afrohaïtiens, du jazz, auprès du patron, un américain, et découvre la musique de Stan Kenton..


A son retour de Haïti au début de 1947 "Bebo" devient l'arrangeur des orchestres du Cabaret Tropicana et le pianiste de la "ORQUESTA del TROPICANA" lorsque l'espagnol Adolfo Araco en devient directeur. VALDÉS, tout en continuant ses activités personnelles reste jusqu'en 1957 au Tropicana.
Parmi celles-ci, "Bebo" intègre l'orchestre de la radio Mil Diez ce qui le conduit à se rapprocher des membres du Mouvement du Feeling. Il organise sa propre formation qu'il installe sur les ondes de RHC Cadena Azul. En 1950 avec cet orchestre il enregistre plusieurs titres pour la Columbia dont "La United café" et "A romper el coco". En 1952, il se rend aussi à México où il dirige le spectacle de la Tongolete. Il en profite pour y enregistrer des compositions personnelles dont la "Rapsodia de cueros".
De nouveau au Tropicana à La Havane "Bebo" se mêle régulièrement aux musiciens qui, au domicile de certains ou après les concerts, se retrouvent pour des descargas.

 

 

Ses activités de compositeur et d'arrangeur le conduisent à fonder sa propre maison d'édition la Valdés Music Corporation.
VALDÉS
figure sur "Cubano!", l'un des rares disques de jazz enregistrés dans l'île en 1952 sous l'autorité de Norman Granz. Cinq thèmes sont au programme dont "Blues for André" et "Con poco coco" une véritable descarga.
Ses goûts pour le Jazz se renforcent et c'est à partir de ceux-ci qu'il crée et lance cette même année un nouveau rythme le batanga, propagé sur les ondes de RHC Cadena Azul par son orchestre "RITMO BATANGA" où figurent Guillermo BARRETO, "Chocolate" ARMENTEROS, "El Negro" VIVAR, Generoso JIMÉNEZ… les mêmes musiciens qui assurent les plus exceptionnelles descargas de la décennie et les deux joueurs de bata Trinidad TORREGROSA et Jesús PÉREZ ainsi que la voix de "Benny" MORÉ. VALDÉS incorpore rapidement le güirero Gustavo TAMAYO à sa formation.

Le rythme est beaucoup plus riche que celui du Mambo duquel il dérive et propose, contrairement à celui-ci, de larges espaces aux solistes comme VALDÉS pouvait l'observer et le faire dans le Jazz. Complexe, il n'est accessible qu'aux meilleurs percussionnistes et reste très difficile pour les danseurs.
Le batanga ne se propage pas plus loin que les côtes de l'île et ne vit pas longtemps.

Les compagnons de route. Guillermo Barreto, Gustavo Tamayo, "El Negro"Vivar. .


Bebo et Ernesto.

Son "HAVANA ALL STARS", une formation quasiment identique à "RITMO BATANGA" qui apparaît en 1954 est aussi à cette époque sur toutes les ondes.
All stars cette formation de "Bebo" l'est véritablement, comptant dans ses rangs, au long de ses quelques années d'existence des musiciens et jazzmen prestigieux : Luis ESCALANTE, "El Negro" VIVAR, trompettes ; Gustavo MÁS, Rafael QUESADA, saxophones ; Generoso JIMÉNEZ, trombone, "Kiki" HERNÁNDEZ, "Cachaito" LÓPEZ, Orestes URFÉ, contrebasse ; et les percussionnistes Candido CAMERO, Guillermo BARRETO, Rolando ALFONSO, "Tata" GÜINES
A partir de 1955, l'orchestre de VALDÉS enregistre de nombreux thèmes dont plusieurs composés par "Bebo" : "Descarga caliente", "Mambo cantabile", "Miramar", "Hot Cha Cha", "Special del Bebo ", "Dile a Catalina" … Il a l'occasion cette année là de travailler comme arrangeur pour Ernesto LECUONA. Le "HAVANA ALL STARS" accompagne aussi le "CUARTETO Las d'AIDA" dans les émissions de radio et de télévision.

"Descarga Caliente" avec le Havana All Stars >>>>


Bebo et son "Sabor de Cuba".

En 1957 "Bebo" organise un nouvel orchestre "SABOR de CUBA" avec lequel il va pendant plus de trois ans être l'un des principaux diffuseurs du Mambo à Cuba . L'orchestre interprète de nombreuses oeuvres de "Bebo", "Mayajigua", "Cha cha N°1"…
Au cours de ces trois ans de vie le "SABOR de CUBA" compte entre autres sur la présence de Jorge VARONA, "El Negro" VIVAR , "Chocolate" ARMENTEROS comme trompettistes; sur Richard EGÜES, Osvaldo PEÑALVER pour la flûte; Emilio et Santiago PEÑALVER pour les saxophones ainsi que Eddy ESRICH, sur Oscar VALDÉS Sr. et Roberto GARCÍA aux percussions…Blas EGÜES puis Emilio del MONTE aux timbales...

La plupart des contrats signés par "Bebo" VALDÉS stipulaient qu'il s'agissait d'enregistrer de la musique instrumentale ce qui lui laissait toute liberté pour accompagner les plus grandes voix dans leurs enregistrements. Ainsi "SABOR de CUBA" a épaulé Amado "Guapachá" BORCELÁ, Rolando LASERIE, Fernando ÁLVAREZ , "Pacho" ALONSO, Xiomara ALFARO, Celeste MENDOZA, Pio LEYVA, "Cascarita", Marta VALDÉS, Omara PORTUONDO... Fréquemment son fils "Chucho" occupe la place de pianiste.
Sous la direction de Armando ROMEU à la tête de l'orchestre du Tropicana - dont il fait l'essentiel des arrangements- il accompagne Nat King Cole en 1958 pour les enregistrements à La Havane du chanteur américain.

En marge de ses grandes formations, "Bebo" se présente, avec d'autres musiciens, le plus souvent en trio, dans divers lieux où le Jazz est roi. Ainsi le trouve-t-on au Sans Souci avec BARRETO et "Papito" HERNÁNDEZ -contrebasse- lorsque Sarah Vaughan y participe à une descarga . Il accompagne aussi le chanteur et showman français Roland Gerbeau.


Gerbeau et Bebo Valdés. Photographie Collection R. Gerbeau.

Il est également au Sevilla avec Orestes URFÉ à la contrebasse, Roberto "Tibo" TIBERIO, drummer, pour accompagner la chanteuse Delia BRAVO ou encore Gloria ARREDONDO.
Sur les ondes et à la télévision on peut l'écouter entouré de Pedro CHAO, saxophone, Dani PÉREZ, batterie, "Kiki" HERNÁNDEZ, contrebasse.

 

Bebo, Delia et Urfé au Sevilla

Le Sevilla est d'ailleurs son lieu de prédilection entre 1958 et 1959 avec une pause de quelques semaines aux lendemains de la Révolution. Puis VALDÉS, à la tête de "SABOR de CUBA" dans lequel officie le plus souvent "Chucho", est programmé cinq fois par semaine par Radio Progreso

En 1960, toujours au Sevilla, "Bebo" VALDÉS est entouré de "Chacho", congas; "Tibo", timbales; URFÉ, contrebasse et des voix de "Guapachá " et Sarita ARCEO. Il travaille également au Salon Elegante de l'hôtel Riviera et à l'hôtel Hilton toujours avec "Guapachá ". A la fin de l'année il s'embarque avec Rolando LASERIE pour le Mexique. On leur a proposé un engagement au Terraza Casino. Pour les deux hommes l'idée est bien ancrée: Il n'y aura pas de retour à Cuba.
Le "SABOR de CUBA" passe entre les mains de Emilio PEÑALVER et deviendra ensuite "ORQUESTA del Teatro MARTÍ".

 

"Bebo" reste plusieurs mois au Mexique, dirige l'orchestre du Max Factor Hollywood Show de la télévision, voyage pour jouer à Acapulco, gagne Los Ángeles en 1962 pour travailler au Million Dollar Theater. Il enregistre avec Miguelito VALDÉS en Californie.
Après un contrat à Tijuana il vole vers l'Espagne où on lui propose de travailler pour le Festival de Benidorm 1963. Il tourne ensuite dans le pays avec la chanteuse chilienne Mona Bell puis avec Lucho Gatica. Au club Bolero de Barcelone il est contacté par les "LECUONA CUBAN BOYS ". Immédiatement il accepte de devenir le pianiste du groupe.
"Bebo" voyage en Europe avec les Cubains et lors de la tournée s'installe définitivement en Suède.
Il continue toutefois à travailler avec le groupe et joue en France, en Espagne en 1964 où les circonstances l'amènent à jouer à Madrid dans un trio. Il quitte les "LECUONA CUBAN BOYS ". La musique l'entraîne à Milan, Beyrouth, Téhéran... Lassé par l'aventure "Bebo" rentre en Suède à la fin de l'année et trouve un engagement à l'Hôtel Ambassador de la capitale.
Il poursuit dans le pays ses activités musicales, jouant dans les bars et restaurants, dirigeant de petites formations, travaillant sur les ferry's à la fin des années soixante-dix.... Au début des années quatre-vingt-dix il ralentit ses activités ne jouant plus que ponctuellement.

Brusquement en 1994 Paquito d'RIVERA lui demande de venir en Allemagne pour enregistrer. Et "Bebo" VALDÉS réalise ainsi "Bebo Rides Again" puis en 1998 le saxophoniste espagnol Eladio Reinon l'invite en l'Espagne à participer à son disque "Aseré". Les liens crées avec Eladio lui permettent quelques mois plus tard d'enregistrer avec le grand orchestre de celui-ci "AfroCuban Jazz Suite N°1", une oeuvre de sa composition.
Une nouvelle carrière commence pour "Bebo" VALDÉS.
En 1999, grâce à Paquito et au disque "94 millas" il retrouve et joue avec son fils "Chucho" sur le thème "El Manisero".
L'année suivante, accompagné de "Patato" VALDÉS et de "Cachao" LÓPEZ il enregistre un disque en trio "El Arte del Sabor".

Pour terminer le siècle il est choisi par le cinéaste espagnol Fernando Trueba pour son film sur le Latin Jazz, Calle 54. Sur le plateau il retrouve de nouveau "Chucho".
C'est "Bebo" qui en 2003, avec le cantaor "El Cigala", inaugure à Madrid le restaurant -salle de concert de Trueba, Calle 54. Il enregistre avec "El Cigala".


Bebo avec le grand orchestre de Eladio Reinón 1998.

L'année 2004 est consacrée à promouvoir à travers le monde le disque enregistré avec "El Cigala", "Lágrimas Negras". A Cuba, "Bebo" se fait remplacer par son fils "Chucho" qu'il rencontre désormais fréquemment, se livrant en plusieurs occasions à des mano a mano sur scène. Il enregistre cette année là "Suite Cubana" une reprise du travail réalisé avec Eladio Reinon. Trueba tourne un nouveau film, El milagro de Candeal sur la vie réelle et fictive de VALDÉS.

Le pianiste commence l'année 2005 dans ce qui est devenu son fief, l'Espagne. Compostelle est la première à l'accueillir. Il poursuit son périple vers Tarragone et dans plusieurs villes du pays. "Bebo" et "El Cigala" donnent aussi plusieurs concerts à travers le monde.

En 2006 il présente sa "Suite Cubana" au Lincoln Center de New York, accompagné par l'orchestre de O' FARRILL Jr.. Il poursuit ses tournées en 2007 aux quatre coins de la planète, en Afrique pour le: Festival des Musiques Sacrées à Fès, en Argentine avec "El Cigala"; à Paris à l'Olympia; à Zaragosse avec "Chucho" pour Noches con Sol, recidivant à Barcelonne, Tarragone... avec le quinteto de "Chucho" et aux Canaries ...... Cette année sort son disque en duo avec le contrebassiste espagnol Javier Colina enregistré précédemment en vivo au Village Vanguard de New York. A Madrid il enregistre avec "Chucho" "Juntos para Siempre". Les thèmes, variés, vont de "Tea for Two" à "Lágrimas Negras" en passant par "La gloria eres tú" ou des compositions personnelles "Rareza del sigo", "A Chucho"....


Le disque sera l'occasion tout au long de l'année 2008 ainsi qu'en 2009 pour le père et le fils de se présenter en concerts à travers le monde, Paris, Barcelone, Teatro Real de Madrid, Cartagena, Jazz'in Mallorca...

 

Teatro Real. Madrid 2009.

" Bebo" joue la musique du dessin animé de Trueba Chico y Rita et début 2010 il reçoit aux Etats Unis le grammy gagné avec "Chucho" pour "Juntos para Siempre".

La santé de Bebo  devient délicate et en 2012 il se retire dans le sud de l’Espagne d’où il ne sort qu’exceptionnellement et délaisse les activités musicales publiques. Il rentre en Suède où il décède en 2013.

© Patrick Dalmace

Discographie sélectionnée:
* " Descarga Caliente. Bebo Valdés & his Havana all Stars ", L.H. 1952-57, Caney CCD 512.
* " Mayajigua. Bebo Valdés & his Orquesta Sabor de Cuba ", L.H. 1957-1960, Caney CCD 509.

* " Guapachá con Bebo Valdés y Sus Amigos - ¿Quién Baila Mejor?" L.H. 1957-1960, Caney CCD 552
* " Bebo Rides Again ", Ludwigsburg 1994, Messidor.
* " El Arte del Sabor ", E.U. 2000, Lola Records 532869-2.
* " Lagrimas Negras ", Madrid 2002, Calle 54 Records 59102.
* " Bebo de Cuba ", E.U. 2002, Calle 54 Records 642022.

* " Juntos para siempre ", Madrid 2007, 2002, Calle 54 Records 6376662.

 
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